vendredi 12 mars 2010

Le Silence Blanc et autres nouvelles de Jack London

Pour ceux qui ne le savent pas, je suis un passionné des récits d'aventure et fantastiques! N'ayant jamais lu de livres de Jack London, je voulais commencer par La Route que j'ai toujours l'intention de lire d'ailleurs. Puis le hasard voulut que je découvre ces nouvelles. Dans le train, il est parfois plus agréable de lire de courts récits que l'on peut finir en un trajet sans en perdre l'élan qui nous tient en haleine.
Ces nouvelles furent un moment de grande évasion dans le Grand Nord de l'Amérique au temps de la Ruée vers l'Or dans le Yukon. Pour les personnes qui connaissent peu cette histoire de l'Amérique, je vous conseille fortement (à moins que vous n'aimiez pas les bandes dessinées) de lire La jeunesse de Picsou Tome 1 et Tome 2 relatifs à sa jeunesse de prospecteur, dessiné avec brio par Don Rosa qui a un don incontestable pour raconter en mêlant les côtés aventurier et tragicomique des péripéties de Picsou à travers le monde.
Mais je m'écarte de mon sujet initial qui concernait les Nouvelles de Jack London. Comme tout livre, lire la préface peut parfois s'avérer très utile pour mieux comprendre l'esprit et ce qu'a voulu exprimer l'auteur. J'avoue que la biographie de Jack London, self made-man, m'a plutôt impressionné. Un homme comme j'aurais voulu être mais je sais bien que je ne lui arriverais pas à la cheville.
Jack London dans ce recueil a voulu dépeindre la vie dans le Grand Nord au moment de la Ruée vers l'Or, une période trouble où les villes s'éteignaient aussi vite que les filons se tarissaient. Un monde bien éphémère. Mais derrière les villes, la nature est toujours: belle à en mourir.
Le Silence Blanc raconte l'histoire de deux hommes blancs et d'une indigène marié à l'un d'eux qui va malheureusement mourir au cours d'une expédition à travers la plaine enneigé où le silence blanc règne et assourdit les hommes. Une histoire qui raconte l'esprit de camaraderie dans des conditions extrêmes. Des scènes d'horreur qui sont transcrites par l'emploi de métaphore des chiens de traineau morts de faim qui en viennent à attaquer leurs maîtres et à s'entredévorer...
Il y a aussi l'histoire de Nam-Bok le Menteur, cet indien qui après avoir été emporté dans sa bidarka au large fut recueilli par les Blancs et découvrit leur civilisation. Un jour il décida de revenir parmi les siens qui ne virent durant la période de la colonisation pas plus de deux hommes blancs en deux siècles. Les récits que Nam-Bok rapporte aux siens complètement abrutis et sauvages le font passer pour un menteur. Finalement ils le considèrent comme bien mort et lui demande de repartir au pays des ombres. Ce qui m'a le plus marqué fut la remarque de la vieille mère du protagoniste lorsque celui-ci la supplie de venir avec lui. Sa mère lui répond alors qu'elle préfère attendre encore un peu avant de mourir et de rejoindre le royaume des ombres d'où vient son fils.
Cette nouvelle symbolise l'incapacité de certaines tribus indigènes à comprendre et accepter la civilisation moderne. Cette civilisation si incroyable mais si inhumaine qu'elle semble inimaginable.
L'autre récit m'ayant touché fut La Ligue des Vieillards, de vieux indiens qui décident de traiter les hommes blancs comme leurs chiens batards: en les tuant. Pour mieux comprendre la métaphore, voici l'histoire des chiens: un homme blanc et son grand chien (un danois je suppose à cause de la description des poils ras) au bord de la mort sont recueillis par les Poissons Blancs (la tribu indienne). Une fois soigné, le chien qui souffrait du froid tue trois uskis et fait des batards avec toutes les chiennes incapables de supporter le froid. Les indiens décident alors de tuer les batards et d'envoyer leurs chiens s'accoupler avec les loups pour leur redonner leur vigueur d'antan. En ce qui concerne les blancs, les voyant tuer les leurs, s'approprier leurs terres, leurs femmes et leurs vivres: les vieux décident de les tuer.
A la fin, il ne reste plus qu'un vieillard las de tuer et qui veut se faire juger par les blancs. L'ironie du sort veut que ce soit son neveu qui traduise ses paroles: image de la civilisation moderne qui s'est approprié tous les jeunes indiens. Les Blancs trop nombreux ont vaincu et leurs coutumes aussi. Triste conclusion.
Mais au bout du compte, la nouvelle la plus choquante par sa chute reste pour moi Le jugement de Porportuk. Porportuk est un riche magnat que l'on peut comparer à un bourgeois du XVIII tandis que Klee Nah est l'équivalent de nos aristocrates. Comme le veut la tradition, ce sont les bourgeois les riches et les autres les dépensiers des plaisirs et loisirs. Klee Nah a une fille qui a suivi un enseignement religieux et à ses 16 ans à la mort de son frère, elle est rappelé auprès de son père et accepte de rester à ses côtés malgré le brillant avenir aux USA qui lui était proposé.
Mais la mort de Klee Nah approchant, il est temps de payer les dettes dont il est incapable. Porportuk son créancier refuse de se faire rembourser dans "l'autre monde", il refuse les anciennes croyances et est devenu un pur matérialiste. Il veut se faire rembourser en épousant la jeune El-Soo, la fille du Chef. Sauvé par la ruse et par son amant Akoon, il s'enfuit des griffes de Porportuk qui arrivera comble de malheur à les rattraper.
La chute de cette histoire est plutot incroyable et je me refuse à la révéler ici car sa soudaineté et sa surprise sont réellement inimaginables.

Je conseille ce livre pour tous les passionnés des récits d'aventure et même comme une réflexion sur la société moderne. Une société matérialiste qui écrasa les traditions et coutumes des indigènes du Grand Nord. Un peuple d'indigènes forcés à s'adapter aux moeurs blanches ou à périr.

Aymeric